L'impression 3D au service de la pâtisserie : rencontre avec Fabrice Pleinchene

10 janvier 2023
Fabrice Pleinchene
Pâtissier chocolatier de formation, Fabrice Pleinchene a développé une société d’impression 3D dans le domaine des arts sucrés. Moules en silicone, petits décors en pâtisserie, montages en chocolat, emporte-pièces, il répond aux besoins des clients, aussi originaux soient-ils. Cette recherche d’originalité et d’innovation, voilà justement ce qui motive ce jeune chef pâtissier, un besoin de créer des choses que personne n’a encore jamais vu. Depuis deux ans, Fabrice Pleinchene gère sa société directement au sein d’Institut Culinaire de France et travaille maintenant pour de nombreux chefs étoilés. Entretien. 

Peux-tu faire une présentation de ton parcours ?

Je suis pâtissier chocolatier de formation. J’ai un cursus assez varié, j’ai commencé dans la pâtisserie et la restauration vers 15 ans et j’ai alterné entre établissements haut de gamme et pâtisserie fine. J’ai également fait quelques concours et de la formation, notamment dans une école en Auvergne où j’ai rencontré la cheffe Kyung Ran et son mari le chef Damien Baccon. Ce sont eux qui m’a proposé de venir avec mon projet d’impression 3D à Institut Culinaire de France. 

Comment tu as pensé ce projet d’impression 3D dans le domaine des arts culinaires ? 

L’idée de ce projet c’était de faire de la création de moules, de petit matériel ou petits outils par le biais de l’impression 3D sur mesure. Par exemple, un chocolatier qui veut poser l’image du clocher de l’église du village ou de son logo sur une tablette va passer par nous pour créer le moule adapté à ses besoins. On va établir la matrice et fabriquer le moule, en échangeant avec le client.

D’où t’es venue cette idée ?

En fait c’est en participant à une émission de télé pour M6 avec deux copains. C’était un concours de pâtisserie et on a fait faire des emporte-pièce à l’imprimante 3D. Bon, le concours n’a pas été une réussite [rires], on a été éliminés assez vite. Mais, après ça, j’en ai discuté avec le chef Richard Hawke, un TRES bon ami, qui m’a convaincu de continuer dans cette idée d’impression 3D. ça faisait longtemps que je faisais mes moules manuellement, j’allais dans des braderies pour trouver des pièces et j’en faisais des moules avec de la silicone. Alors j’ai décidé de sauter le pas et de me former professionnellement. Ensuite, j’ai acheté des imprimantes 3D et je me suis lancé. J’ai repris des idées, des petits bricolages que je faisais avant et je les ai transposés informatiquement. Tout est parti de cette émission ratée, comme quoi on peut créer du positif même dans le négatif. 

Et comment t’es-tu retrouvé lié à Institut Culinaire de France ?

Comme je l’ai dit, on s’était rencontré dans une école avec Damien et Kyung-Ran, en 2013 ou 2014, et on avait gardé contact. Quand ils sont rentrés d’Asie on s’est revu pour discuter du projet Institut Culinaire de France dans lequel ils se lançaient tous les deux. J’avais de très bons contact avec la chef Kyung-Ran, on parlait beaucoup de créativité en pâtisserie. Je venais de lancer l’entreprise d’impression 3D et elle pensait que ce serait une belle idée de l’intégrer à l’école pour en faire une vertu d’innovation et une force. J’ai aussi accepté de donner des cours de pâtisserie et de faire des stages professionnels.  

Comment ça se passe aujourd’hui ? 

Aujourd’hui on est 3 dans l’entreprise. Victor m’a rejoint il y a 2 ans. On est amis depuis une dizaine d’années et on a voulu tenter la collaboration car on a chacun des compétences complémentaires. Et c’est justement ça qui fait que ça marche bien ! Et on a Andréa qui nous a rejoint depuis quelques mois en stage et qui a l’air plutôt heureuse de travailler avec nous [rires].

L’impression 3D c’est vraiment la technologie innovante au service de la pâtisserie. Il y a déjà plein de machines que l’on utilise beaucoup en pâtisserie comme la water cut, une découpeuse à jet d’eau qui permet de détailler avec une très grande précision la nougatine, le pastillage, les entremets, le chocolat… L’impression 3D ça permet avant tout de créer des volumes. Ça peut être des petits décors en pâtisserie, des montages en chocolat, des emporte-pièces, des matrices pour tablettes… ça ouvre une infinité de possibilités. 

Impression 3D - crédit : Mikael Boudot
Impression 3D - crédit : Mikael Boudot
Impression 3D - crédit : Mikael Boudot

C’est un gros point fort d’avoir cette technologie au sein de l’école.

Oui, c’est clairement un atout ! Aujourd’hui des écoles où on apprend la pâtisserie il y en a plein mais des écoles où on apprend à créer des bases de moules personnalisés ou des petites pièces pour donner de l’originalité aux desserts il n’y en a quasiment pas. Et il commence à y avoir pleins d’échanges sur ce sujet, avec des personnes d’autres écoles qui me demandent comment on fonctionne parce qu’ils ont ces machines mais ne s’en servent pas. C’est une technologie qui se développe mais c’est vrai qu’Institut Culinaire a été comme une école précurseur. 

Tu travailles aujourd’hui avec des grands pâtissiers ?

Oui, même si ça fait trois ans que le projet a été réellement lancé je travaillais déjà avec des confrères pâtissiers qui me font toujours confiance et qui sont devenus des clients fidèles aujourd’hui. Ils m’ont permis de m’assurer une légitimité. Aujourd’hui on travaille avec des clients de renom tels que des chefs étoilés, des candidats au concours de meilleur ouvrier et des candidats à des concours internationaux. Ce qui est assez dingue, et ce n’est pas péjoratif, c’est que souvent on nous appelle avec un problème [rires]. Nous on est là pour trouver une solution. C’est ça qui est très amusant et que je trouve très stimulant, de rechercher l’innovation et l’originalité. C’est ce qui m’a motivé à l’origine à devenir pâtissier, pour créer des choses qu’on n’a encore jamais vues.

Quels sont tes projets pour la suite ?

C’est de continuer à développer l’activité, à avoir plus de récurrence sur un catalogue, à réussir à me diversifier aussi. Et surtout, continuer à prendre du plaisir dans ce que nous faisons.

Ce serait quoi le moule le plus bizarre sur lequel tu as travaillé ?

Il n’y en a pas particulièrement, c’est vrai qu’on a bossé sur des trucs particuliers… Le plus sport ce serait L’homme qui tombe, une œuvre de Danièle Arshan qui était sur le plafond d’un client étoilé et qu’on a dû reproduire pour une buche de Noël. Je crois que c'est le projet le plus fou sur lequel nous avons travaillé. Cette œuvre représente un corps recouvert d’une couche de tissu qui s’apprête à tomber du plafond. C’est très surprenant quand tu rentres dans le restaurant. Le chef pâtissier voulait une bûche de Noël qui reproduise cette œuvre. On a créé le moule, on a remodelé à la main et on a finalement réussi !  C’est pour ça que j’aime dire que le client vient avec un problème et qu’on est là pour apporter une solution. 

Stage professionnel avec Fabrice Pleinchene

Du 30 janvier au 1er février

Inscriptions